Etude mono-dimensionnelle de l'Agout. Gestion des vannes et écretage des crues.
Recueil des données- Utilisation
de SIC -Géométrie-Calage
Reproduction de la crue des 16 et 17/12/95-Application
possible du modèle
Nous avons limité notre étude à l'amont de Castres. En effet, les différents rapports que nous avons pu consulter sur les différentes crues ayant eu lieu dans la vallée de l'Agout ont montré que leur impact s'arrêtaient (principalement) au niveau de Castres. De plus les 2 principaux barrages (du Laouzas et de la Raviège) étant bien en amont de Castres, et les logiciels mis à notre disposition n'étant que des versions pédagogiques, il nous était difficile de faire notre étude sur un parcours plus long.
Recueil des données. Analyse du terrain.
La plupart des données nous a été fournie par M.Fauvel, président de l'association des riverains du Haut Agout, pourvoyeur de notre sujet d'étude.
Les profils en long précis des différents cours d'eau à modéliser, les courbes de tarage des stations de Castres et de Rocalé (Gijou), ainsi que des histogrammes de crues à Brassac, sur l'Agout, nous ont été fournis par la DIREN.
Les débits moyens mensuels et annuels et les histogramme de crues à Fraïsse, à l'amont de notre modèle, ainsi que les caractéristiques des retenues de la Raviège et du Laouzas nous ont été communiqués par la DTG de Toulouse (EDF).
Toutefois, il nous manquait les données permettant de définir l'évolution globale des profils en travers et des caractéristiques du lit (Strickler, sinuosité, forme du lit majeur, ...) de Fraïsse à Castres. Pour cela, nous sommes allé sur le terrain pour observer et mesurer le lit afin de pouvoir le caractériser au mieux (lits mineur et majeur), photos à l'appui.
Utilisation du logiciel SIC:
Présentation du logiciel:
Le logiciel SIC (SImulation des Canaux d'irrigation) a été développé par le Cemagref. Il s'agit d'un logiciel de simulation hydraulique monodimensionnel et, plus récemment, de calcul du transport solide, en canaux et cours d'eau naturels à surface libre.
Il se divise en 3 unités (TALWEG pour la géométrie, FLUVIA pour le régime permanent et SIRENE pour le régime transitoire) qui possèdent chacune 3 fonctions : édition des données, calcul numérique et visualisation des résultats.
Géométrie :
L'édition des données géométriques se fait sous EDITAL et génère automatiquement un fichier .TAL :
On lance alors TALWEG qui effectue le calcul géométrique et génère les fichiers nécessaires aux calculs tant permanents que transitoires, ainsi qu'aux interfaces d'affichage des résultats. Si la géométrie n'est pas correctement décrite des messages d'erreur en font part à l'utilisateur.
Calcul permanent :
Sous EDIFLU l'utilisateur peut rentrer toutes les données nécessaires au calcul :
FLUVIA lance alors le calcul et inscrit les résultats dans un fichier .SRF. Si des incohérences apparaissent (passage en torrentiel, hauteurs d'eau nulles, ...) l'utilisateur en est informé pendant le calcul et peut l'interrompre.
La visualisation des résultats se fait sous VISFLU pour la partie graphique et sous RESFLU pour la partie numérique, avec possibilité de sortie sur fichiers.
Calcul transitoire :
Les paramètres nécessaires au calcul sont rentrés sous EDISIR. L'initialisation du calcul se fait à partir des résultats obtenus en régime permanent.
Les données à fournir sont sensiblement les mêmes que pour le calcul permanent, mis à part qu'il faut définir un pas de temps et une durée de simulation, et que les apports ou prises de débit ainsi que la gestion des ouvrages peuvent varier au cours du temps. La condition limite aval peut être définie au choix en H=f(Q) ou en H=f(t).
SIRENE effectue alors le calcul et inscrit les résultats dans un fichier .RES. Les mêmes options sont disponibles pour la visualisation des résultats.
Choix de la disposition des noeuds et des biefs :
L'étude géographique du site et de ses aménagements nous a amené au choix du modèle géométrique simplifié suivant :
En effet l'Agout possède 2 affluents principaux qui sont la Vèbre et le Gijou. Etant donnée l'étude qu'il nous a été demandé de mener, la modélisation de ces 2 cours d'eau n'était pas nécessaire. Les apports de débit dus à ces affluents seront donc directement simulés par des prises (ici des apports) aux noeuds "AgVeb" et "AgGij".
L'apport au noeud "AgVeb" correspond au débit réservé à l'aval du barrage du Laouzas auquel s'ajoutent les débits de ruisseaux affluents de la Vèbre : le Rieufrech, le Ramières et le Pradas.
Le débit d'apport au noeud "AgGij" correspond au débit du Gijou diminué de ce qui est prélevé en vue de l'alimentation de l'usine du Carla, auquel s'ajoutent les débits de petits affluents de l'Agout : le Falcou et l'Agrès.
Un autre noeud a été placé à Carla. L'apport à ce noeud correspond aux eaux rejetées par l'usine du Carla après turbinage ainsi qu'au débit d'un autre affluent : le Lignon.
Remarque : d'autres prises et usines hydroélectriques sont présentes sur l'Agout, entre la Raviège et la confluence avec le Gijou. Nous avons choisi, pour ne pas surcharger inutilement notre modèle, de ne pas les modéliser car leur présence n'affecte le régime d'écoulement qu'entre la Vèbre et le Gijou. La ligne d'eau surce bief sera donc approximative mais ceci n'affectera pas les résultats dans la zone qui nous intéresse (et où se situe la commune de Roquecourbe), à savoir entre le Gijou et Carla.
Description des profils en long et en travers :
Il s'agissait de décrire correctement l'altimérie du lit de l'Agout tout au long de son cours, la hauteur des berges et éventuellement les cotes de débordement entre lits mineur et majeur, ainsi que l'allure des profils en travers de la section mouillée.
Voici le profil en long que nous avons défini. La hauteur des berges n'a rien de significatif ; il s'agit simplement de la placer suffisamment haut pour éviter tout débordement (en particulier au niveau des retenues d'eau). Les zones où la cote du majeur est inférieure à celle des berges correspondent aux zones où il sera pris en compte.
La section du lit a été choisie partout trapézoïdale, en ajustant sa largeur et le fruit des berges (pente des berges).
D'autres données telles que la sinuosité moyenne par bief (rapport des distances curvilignes et en ligne droite) ainsi que la déclaration en sections singulières (pour avoir la possibilité d'y placer une vanne) des sections aval des barrages ont également été définies.
Ci-dessous l'interface Edital qui nous a servi à rentrer l'ensemble des données.
Dimensionnement des retenues d'eau :
Les principales retenues présentes sur lecours de l'Agout ont été modélisées : de l'Amont vers l'aval, les barrages de la Raviège, de Ponviel, situé immédiatement à l'aval du précédent, de Record et de Luzières.
Par soucis de simplicité, les retenues ont été dimensionnées en considérant que leur section transversale était trapézoïdale de largeur constante et que la hauteur d'eau augmentait linéairement en leur sein.
Un calcul simple nous a alors permis de déterminer la largeur à conférer à ces retenues afin de suivre au plus près les données les concernant : hauteur normale de la retenue (cote NGF) et volume total.
Voici les largeurs (au fond) des retenues : la Raviège : 445 m, Ponviel : 73 m, Record : 61 m et Luzières : 45.75 m.
Il a alors fallu définir 2 sections à la même abscisse à l'amont et à l'aval de chaque retenue, l'une correspondant à l'Agout lui-même, l'autre représentant le lac.
Définition de la courbe de tarage de sortie, et des différentes conditions d'apports internes (Gijou, Vèbre, pluie...):
Calage du modèle en régime permanent :
Le calage de notre modèle a été effectué à partir de données moyennes annuelles, en régime permanent.
Néanmoins, par manque de données de type tarage (les stations de Brassac et Fraïsse n'effectuent que des mesures de débits, seule la station de Castres propose des courbes de tarage), ce calage n'a été effectué que selon des considérations qualitatives (allure générale des limnimètres). Pour réaliser un calage rigoureux il aurait été utile de disposer de courbes de tarage en 1 voire 2 points intermédiaires au moins à l'intérieur de notre domaine, à Brassac notamment.
Les variables sur lesquelles nous avons principalement joué sont les coefficients de Strickler et les largeurs du lit.
Pour la condition limite aval nous disposions de la courbe de tarage de la station de Castres :
1er calage sur les données moyennes de débits en novembre :
Nous avons choisi le mois de novembre car, ne disposant d'aucune station de jaugeage dans notre domaine d'étude, nous avons ainsi pu vérifier approximativement les résultats obtenus au regard de nos observations sur le terrain, qui ont eu lieu en novembre.
Le débit amont à Fraisse a été fixé à 2 m3/s, ce qui correspond à une moyenne de 2 données dont nous disposions.
Le débit d'apport de la Vèbre est la somme du débit réservé à l'aval du barrage du Laouzas (0.123 m3/s) et du débit moyen du Rieufrech (0.283 m3/s). Nous l'avons approximativement fixé à 0.4 m3/s.
Le débit du Gijou à cette époque a été corrélé à partir des valeurs de débit spécifique à Rocalé : on obtient la valeur de 14.653 m3/s. N'ayant pu avoir connaissance du débit prélevé par l'usine du Carla, nous avons fixé cette valeur à 10 m3/s, ce qui sera la valeur du débit d'apport au noeud situé à Carla. La valeur du débit d'apport à la confluence avec le Gijou a donc été fixée à 4.653 m3/s.
Les vannes des 4 barrages ont été mises en mode automatique. Grâce à ce mode de gestion l'ouverture des vannes est calculée de manière à obtenir la hauteur d'eau désirée à l'amont immédiat du barrage. Les hauteurs d'eau ont été choisies de manière à respecter les cotes de retenues normales, à savoir : 662 m NGF pour la Raviège, 629 m NGF pou le Ponviel, 468.75 m NGF pour le Record et 334.8 m NGF pour Luzières.
Voici la ligne d'eau obtenue (en bleu) :
On observe bien les 4 retenues d'eau. Pour plus de précision concernant la ligne d'eau entre ces retenues, voici le graphe des hauteurs d'eau obtenu :
Commentaires :
Au vu de nos observations sur le terrain cette courbe parait cohérente. Nous avions en effet noté que l'Agout n'était un cours d'eau d'importance qu'après la confluence avec le Gijou (là où la hauteur d'eau se maintient au dessus de 40-50 cm). A Fraisse, à La Salvetat et à Brassac nous avions noté que les hauteurs d'eau étaient très faibles, ce qui est bien le cas avec notre modèle. A Castres nous avions noté qu'en revanche le niveau d'eau atteignait bien le mètre environ. Néanmoins ce ne sont là que des considérations qualitatives, par manque de mesures fiables (pas de station de jaugeage sur le domaine étudié).
Pour être interprétée correctement cette courbe doit être lissée, les oscillations ponctuelles et l'allure générale en créneaux de la courbe ne correspondant à aucune réalité physique. Les oscillations sont dues à des imprécisions lors du calcul numérique et l'allure en créneaux vient du fait que la géométrie du lit a été rentrée par tronçons. Les sauts de hauteur d'eau à l'amont des retenues sont dus à la présence d'élargissements brusques dans notre géométrie en ces points. En réalité l'élargissemnet du lit à l'amont des retenues se fait progressivement et la hauteur d'eau ne subit pas ces fluctuations brutales. Nous n'avons pas cherché à éliminer ces imperfections du fait qu'en ces points la valeur de la hauteur d'eau nous importe peu. Le pic à l'amont immédiat de Castres est dû, quant à lui, à une nette rupture de pente à cet endroit. En effet à l'abscisse 90 km la pente passe approximativement de 2,7.10-3 à 6,7.10-5.
2nd calage sur les données de la crue du 16 décembre 1995 ( à 16 h):
Conformément aux données de l'époque, fournies par EDF, le débit amont à Fraisse a été fixé à 51.67 m3/s. Le débit à l'amont de la Raviège étant de 134 m3/s nous avons donc fixé le débit d'apport de la vèbre à 82.33 m3/s.
Le débit du Gijou a été corrélé à 221.38 m3/s, auquel nous avons choisi de retirer le débit maximum turbinable par l'usine du Carla, soit 30.5 m3/s qui seront reversés au noeud "Carla".
La hauteur d'eau de la Raviège était de 661 m NGF à ce moment, soit 1 mètre de moins que la hauteur normale. Nous avons donc décidé de retirer également 1 mètre aux hauteurs d'eau normales des 3 autres retenues dans l'ajustement des ouvertures de vannes.
Ci-dessous la ligne d'eau obtenue :
Commentaires :
Il convient en premier lieu de noter que cette simulation ne constitue pas une reconstitution fidèle de ce qui s'est passé le 16/12/95 à 16h. En effet, ce calcul étant effectué en régime permanent, Sic itère le calcul jusqu'à obtention de grandeurs constantes dans le temps. Ainsi, après calcul, les débits en sortie de retenues (aux vannes des barrages) sont égaux ou presque aux débits à l'amont de ces retenues afin d'obtenir une cote de retenue constante. En réalité à cet instant les débits de sortie étaient plus faibles que les débits d'entrée.
L'allure générale de la courbe est conservée, mais les hauteurs d'eau sont bien évidemment beaucoup plus importantes.
La cote de débordement étant approximativement de 3 mètres après le soixantième kilomètre, on retrouve bien la zone inondée à l'époque à l'amont de Castres (dont Roquecourbe, située à une vingtaine de kilomètres de Castres).
Détection des passages en régime torrentiel :
Avant la confluence avec le Gijou, la pente moyenne de l'Agout est très élevée (9.10-3 en moyenne). Il est donc logique que le régime d'écoulement y soit torrentiel sur certains tronçons.
Ci-dessous les valeurs du Froude le long de l'Agout sur la simulation du 16/12/95 à 16h. En jaune sont localisées les zones de passage en régime torrentiel. On remarque qu'à l'amont des retenues une section est en torrentiel. Ceci n'a aucune signification et est encore une fois dû à l'élargissemenet brusque du lit en ces points dans notre géométrie.
En revanche on note bien de larges passages en torrentiel, notamment tout à l'amont du modèle.
Or Sic ne fonctionne en transitoire qu'en régime fluvial. Nous avons donc dû couper notre modèle pour n'en conserver que la partie aval (après l'abscisse 55 km; le Gijou est situé à l'abscisse 52.5 km). L'évolution des hauteurs d'eau nous intéressant particulièrement à Roquecourbe (abscisse 70 km environ), cette troncature du modèle nous permettra néanmoins de tirer des conclusions quant au débordement de l'Agout dans cette commune.
Exploitation du modèle : reproduction en régime transitoire de la crue intervenue entre le 16/12/95 à 16 h et le 17 à minuit.
Grâce aux données heure par heure du débit à Fraisse et à l'aval de la Raviège, nous avons pu reconstituer l'évolution des hauteurs d'eau dans la partie aval de l'Agout.
Par itérations successives (i.e. simulations successives) nous avons ajusté les débits du Gijou et de l'usine du Carla jusqu'à obtention d'un histogramme de débits à Castres qui corresponde avec les données relevées à l'époque.
Ci-dessous la comparaison des courbes obtenues (H(t) entre le 16 à 16h et le 17 à 24h) et mesurées à Castres.
L'allure générale de la courbe correspond bien. On a bien obtenu le pic à 12 h environ le 17, avec la même valeur du débit de pointe. Cependant nous avons obtenu 2 pics successifs alors qu'il n'y en a qu'un en réalité. Ceci est dû au débit turbiné par l'usine du Carla que nous n'avons pas ajusté au mieux.
Ci-dessous une animation qui peremt de visualiser les hauteurs d'eau obtenues sur tout le modèle.
Le trait rouge situe la cote de débordement approximative à Roquecourbe (fixée à 3 mètres), qui se trouve à l'abscisse 70 km.
La cote de l'eau dépasse la cote de débordement à partir du 16 à 21 h environ. Les innondations intervenues les 16 et 17 décembre 95 sont donc bien obtenues par notre modèle.
Application possible du modèle : mise au point d'un mode de gestion des vannes des barrages pour l'écrêtement des crues.
En relançant des simulations transitoires avec des débits modifiés à l'aval des retenues, il serait possible d'optimiser la gestion des vannes pour obtenir des hauteurs d'eau moindres, voire en dessous de la cote de débordement partout.
Cependant il est impossible de tirer des conclusions quant à la faisabilité de l'écrêtement des crues du fait que nous ne connaissons ni les contraintes des gestionnaires (EDF en l'occurence) quant à la production électrique, ni les délais précis de prédiction des précipitations de Météo France.
En effet des lâchers d'eau préventifs pourraient permettre d'éviter les crues. Cependant ces lâchers, pour être efficaces, supposent que la crue ait été prévue suffisamment tôt. Ensuite il faudrait faire des lâchers d'eau (tout en veillant à ne pas provoquer de débordement bien sûr) afin d'abaisser le niveau d'eau dans les retenues (la Raviège principalement) et créer ainsi un réservoir qui permettrait, en se remplissant pendant la crue, d'amortir celle-ci en aval. Appliquer un tel procédé suppose en plus que le niveau d'eau dans la Raviège ne passe jamais en dessous du seuil minimal fixé par la demande électrique.