Historique des crues sur le haut Agout |
Dans cette partie le but n'est pas de répertorier toutes les crues ayant affecté le haut Agout mais de donner une idée non exhaustive de l'ampleur que les crues peuvent atteindre dans cette région. Ainsi nous avons mis l'accent sur quelques évènements majeurs pour lequels nous avons collecté suffisamment de d'informations sur les causes, le déroulement et l'impact de ces innodations:
Ce fut la crue record sur le haut Agout (de Fraisse jusqu'à Roquecourbe) avec des hauteurs d'eau atteignant 7.56m à Brassac et 5m à Castres. Le registre des délibérations du conseil municipal de Brassac du 21 Octobre 1861 fait état d'une "trombe d'eau de 3 heures tout au plus qui a provoqué une crue locale exceptionnelle". Par contre, la crue n'a écoulé qu'un volume global relativement faible, autour de 20.106 m3 , tant elle fut brève. Ce chiffre ne correspond qu'à une lame d'eau de 55 à 60 mm. Nous savons aussi que l'averse venait du Sud-Est, et qu'il est possible que le déplacement du paroxysme pluvieux ait accompagné l'onde de crue d'amont en aval. Au delà de Roquecourbe, l'onde s'est beaucoup aplatie, n'étant pas nourrie par une averse généralisée de longue durée.
Cette crue a causé de gros dégâts dans la traversée des bourgs riverains de l'Agout notamment à Brassac où le flot emporta le Pont-Neuf et saccagea les ateliers si bien que Napoléon III fit voter une subvention de 1 millions de francs pour aider les sinistrés. La Revue du Tarn déclare en 1941 que "la crue de 1861 a détruit bon nombre d'établissement industriels sur l'Agout, l'Arn et le Thoré... Il y a de nombreux chômeurs, disponibles pour les travaux de terrassement des voies ferrées".
Ainsi cette crue fait matière de référence en ce qui concerne le haut Agout avec une section mouillée deux fois supérieure à celle de mars 1930. Les estimations de débit effectuées par EDF en 1955 aboutissent à une pointe de 1500 m3 soit un débit spécifique supérieur à 4100 l/s/km2.
Cette crue a été qualifiée de millénale par Maurice Pardé et même si son occurence est discutable elle correspond à un évènement exceptionnel tant par son ampleur que par les dégâts associés. La neige a été un facteur sensiblement agravant pour cette crue même si la cause immédiate fut une averse Sud-Est de 60 heures extensive vers le Nord-Ouest. En effet du 7 au 21 février l'ensemble des montagnes connut un blocage des communications routières (congères de plusieurs mètres d'épaisseurs), au dessus de 600-700 mètres d'altitude, il y avait encore un mètre de neige à la veille de la grande averse du 28 février. La quasi totalité du manteau neigeux a fondu lors de l'averse du 1er au 3 mars. Sur le haut Agout elle est en troisième position des crues les plus fortes depuis les 80 dernières années. A Brassac le niveau d'eau est inférieur à celle de 1861 atteignit 4.70m, à Roquecourbe en revanche elle fut plus forte (5.10m). Cette crue s'est étendue jusqu'à Castres qui a vu monter les eaux en 6h pour culminer à 7.60m à l'échelle du Pont Neuf.
Les dégats engendrés par la crue sont effrayant: 200 morts, 7000 têtes de bétail noyées, centaines de maisons détruites, dizaines de ponts emportés, voies ferrées arrachées ou sectionnées, routes coupées... D'énormes quantités de matériaux flottant se coincent aux Ponts Neuf et Vieux de Castres qui sont aveuglés et submergés (parapets emportés). En milieu de nuit l'électricité est coupée en ville et des dizaines de maisons s'effondrent le long de la rivière.
Outre l'ampleur considérable atteint par cette crue, on a contaté une grave carence au niveau de son annonce. En effet les prévisions météorologiques (radio et presse) de l'époque furent banales n'anonçant qu'un "temps médiocre avec des pluies sur les montagnes". Ainsi l'effet de surprise pu être à l'origine des nombreuses victimes. Le deuxième facteur est du au fait que jusqu'alors il était admis qu'après Noël les risques de grandes crues cessaient (avant les crues apparaissaient de septembre à décembre). Enfin les habitations (souvent en torchis) étaient construites plus de 15 mètres au-dessus du niveau normal des eaux. On ne pensait pas que le niveau de la rivière gravirait ces 15 mètres en 10 heures, en détruisant au passage le réseau téléphonique privant l'aval de ce que l'amont aurait pu lui annocer. De plus cette crue a eu lieu de samedi à dimanche ce qui correspond au pire moment pour les dits "annonceurs".
Le 9 mars le deuil national est déclaré. De l'eau est distribuée par des camions citernes car des épidémies sont craintes. Les bâtiments sont passés à la chaux. Des dons arrivent de partout. Depuis cette époque on a heureusemant constaté une nette amélioration du système d'annonce de crue.
Cette crue est survenue à la suite d'un vent Sud-Est et d'énormes abats d'eau en un seul épisode de 40 heures. En outre il avait plu abondamment en novembre et début décembre, et neigé quelques jours avant l'averse; la fusion nivale avait peaufiné la saturation des sols. Les rivières étaient en régime de haute eaux depuis 2 ou 3 semaines. L'hiver de cette année fut qualifié "d'hydrologique à l'état pur". De surcroît (mais c'est normal en une pareille situation) l'état de remplissage des barrages, notamment La Raviège et le Laouzas, était tel qu'il n'offrait aux gestionnaires qu'une marge de manoeuvre fort maigre.
Le 15 décembre l'onde de crue se trouve au barrage du Laouzas et se trouve à La Raviège à partir de 23 heures pour atteindre son maximum le 16 de 2 heures à 10 heures. L'onde est arrivée à Castres entre 6 et 7 heures. La Raviège a seulement pu atténuer le début de la crue mais pas le pic: 2.25m à Brassac et 3.68m à Castres. Ainsi la montée des eaux fut très rapide et perturba les délais d'annonce: survenant encore une fois dans la nuit de samedi à dimanche (ce qui n'arrange rien); l'Equipement n'eut pas le temps de barrer certaines routes, et les pompiers, les Maires ou les gendarmes de prévenir certains riverains.
En ce qui concerne les dégats 20 à 25 communes tarnaises (de la Montagne Noire au Sidobre) ont été sinistrées y compris une quainzaine d'entreprises. Citons comme exmple la filature de Crouzet qui a subit 5 millions de francs de pertes et dont les dégâts ont causé 15 jours de chômage technique pour ses 67 salariés. Par arrêté inter-ministeriel du 5 août 1996, le caractère de calamité agricole a été reconnu aux pertes de fond et aux pertes de récolte occasionnées aux cultures légumièrees et florales à la suite de cette innondation.
Durant l'automne 1996 bien que les épisodes pluvieux furent modérés (10 à 40 mm/j) leur fréquence (40 jours de pluie sur 80) rendit cette saison particulièrement "arrosée". De surcroît une averse de neige a couvert l'ensemble du domaine montagneux au-dessus de 700m; ce stock neigeux va fondre jusqu'au 6 décembre. La fusion nivale a donc augmenté l'état de saturation des sols. La cause immédiate de la crue a été une averse Sud-Est qui commença le 6 juqu'au 7 en fin d'après-midi (320 à 400mm en 2 jours sur les Monts de Lacaune par exemple). Ainsi comme l'année précédente le niveau de remplissage des barrages ne permettait pas une marge de manoeuvre suffisante aux gestionnaires.
La Raviège a vu passer 100 millions de m3 soit 2 fois et demi sa capacité, même le fait d'anticiper n'aurait donc pas empêché l'eau de passer. En effet EDF explique que ses barrages servent à maximiser la production d'énergie et se doivent seulement de ne pas agraver les crues. Il faut aussi savoir qu'à plus de 800m3/s (débit largement dépassé en cas de crue) la production d'électricité est nulle. De plus EDF ne peut effectuer de lâchers préventifs sans autorisation préfectorale. Au moment de l'alerte le schéma est le suivant: le service d'annonce des crues rattaché à la DDE de Montauban prévient la préfecture qui ensuite alerte les pompiers et EDF. Au plus fort de la crue les barrages EDF ont quand même retenu 100m3/s. Par contre l'association de riverains de l'Agout pense que les lâchers préventifs campent sur des positions anciennes qui ne tiennent pas compte des données météorologiques actuelles et ainsi ils pensent que les barrages amplifient les crues.
Le coût des dégâts avoisine les 400 millions de francs français, la crue ayant dévasté plus de 1500 habitations, usines ou magasins dont 600 à Montauban. Le niveau d'eau a atteint 3.45m à Castres (2ème crue du siècle après les 7.60m de 1930).
Dans la vallée du Thoré les protections (des enrochements par exemple) mises en place après la leçon de 1995 ont été efficaces car les effets de cette crue ont été moins ressentis.