L'Aérodynamique
2. Fonctionnement de la voilure
a) Rôle du vent |
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Autrefois, la forme et la position des voiles ne permettaient de faire avancer le bateau uniquement dans la direction du vent. On sait mieux aujourd’hui faire avancer un voilier contre le vent, aux allures dites « de près » par opposition aux allures « portantes » (qui se situent au delà du vent de travers).
Schéma rose des vents
Jusqu’aux directions limites du près, si on oriente correctement la voilure le navire ne dérive pratiquement pas. Les allures correspondantes sont dites allures de « largue ». Plus on remonte vers la direction du vent, plus l’angle entre le vent et la voilure est fermé : la voilure se comporte comme une aile portante. La voile est l’équivalent d’un profil cambré dont la cambrure est ajustable avec le creux. La pression du vent développe sur elle une portance P et une traînée T dont la composante vers l’avant de leur résultante F permet au navire de progresser contre le vent. L’angle entre la direction du vent et l’orientation moyenne des voiles est l’angle d’incidence. Le point d’application de la portance est le centre de voilure. Lorsque l'angle d’incidence devient trop petit, la portance diminue rapidement jusqu’à devenir nulle quand le navire se trouve exactement face au vent. Cette situation est celle du vent debout. Pour faire route dans cette direction le voilier doit louvoyer ou tirer des bords c’est à dire de remonter le plus près possible du vent d’un côté puis de l’autre.
Le vent apparent est la différence entre le vent réel et le vent dû à la vitesse propre du navire appelé vent relatif. Ainsi si un navire fait route vent arrière, le vent que ressent le marin se trouvant à bord est plus faible que le vent réel. Le vecteur vitesse du vent relatif est égal et opposé au vecteur vitesse du navire. Le vent apparent est la somme géométrique du vent réel et du vent relatif. C'est évidemment le vent apparent qui propulse le voilier. En vent arrière, celui-ci ne peut aller plus vite que le vent. Par contre lorsque le navire fait route en se rapprochant de la direction du vent, le vent apparent devient d'une part plus important que le vent réel, et d'autre part que sa direction fait un angle plus aigu avec la route du navire. Plus la résistance à l'avencement du voilier est faible, plus sa vitesse potentielle est élevée, mais plus sa vitesse est élevée, plus, pour un vent réel donné, le vent apparent est aussi élevé tandis que l'angle avec la route suivie est petit. Plus un voilier accélère et plus on est donc obligé d'en écarter la route de la direction du vent réel, pour conserver à sa voilure de bonnes performances (par une incidence suffisante). Ceci explique que plus un voilier va vite, moins il remonte le vent, cependant que sa voilure reste constamment réglée pour le près serré. La vitesse du navire dans ces conditions peut parfaitement être beaucoup plus élevée que la vitessse du vent.
Dans le fonctionnement d’un engin à voile, c’est le vent apparent qui est le plus important :
Pour un vent réel donné, le vent apparent dépend de la route et du réglage de l’ensemble du bateau (voilure et partie immergée). Pour une route et un cap de vent réel donnés, le voilier sert le vent d’autant plus près que sa vitesse est grande.
On ne doit pas toujours interpréter une variation de cap du vent apparent comme une variation de cap du vent réel.
Si le plan d’eau est le siège d’un courant Vc, nous remarquons que la vitesse Vf par rapport au fond n’est pas la vitesse par rapport à l’eau :
Le vent apparent Va dépend alors du courant Vc :
La quantité Vac est appelée vent apparent de courant ; elle ne dépend pas de la vitesse du bateau, et correspond au vent apparent qu’observerait le skipper d’un bateau entrainé par le courant, c’est à dire immobile par rapport à l’eau.
Il diffère peu du vent réel lorsque le courant est faible mais il ne doit pas être négligé si on veut construire une navigation tactique très précise.
b) Forces Aérodynamiques |
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Lorsqu'un bateau navigue à vitesse constante la somme des actions exercées par le vent et l'eau est nulle. Un navire est en équilibre mécanique s'il est animé d'un mouvement de translation uniforme, c'est à dire, s'il conserve un cap constant, une vitesse constante et s'il ne subit ni roulis ni tangage.
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La résultante F, des forces de portance P et de traînée T, développée par la voilure est équilibrée à chaque instant par les autres forces auxquelles le navire est soumis : forces hydrostatiques d'une part, hydrodynamiques (et et aérodynamiques avec tout ce qui constitue le fardage) d'autre part.
Pour l'essentiel, la force F peut se décomposer en une force dirigée vers l'avant, composante propulsive ou d'avancement Fa , et une autre dirigée sous le vent perpendiculairement à la précédente : la force inclinante Fi (généralement trois ou quatre fois supérieure à Fa). F est égale et opposée à une force hydrodynamique appliquée au flotteur (F') qui peut se décomposer à son tour d'une part en une force Fr, dirigée vers l'arrière, résultante des forces de résistance à l'avancement, et d'autre part en une force transversale Fd, force anti-dérive. Fd est une portance perpendiculaire à la route suivie par le navire, créée par le mouvement dans l'eau de la carène en situation de dérive plus ou moins accentuée selon les caractéristiques du flotteur, en particulier ses appendices : aileron de dérive, gouvernail. Le point d'application de F' est le centre de dérive.
Les forces F et F' génèrent :
Tout ceci est relativement théorique puisqu'on considère ici le voilier dans une situation précise (figée) à un instant précis. Aussi bien ses mouvements à la mer que les variations incessantes des conditions de vent : force, direction ... font que cette situation est essentiellement instable ou du moins évolutive. Les réactions du navire pour ce qui concerne les inclinaisons transversale et longitudinale dépendent de ses seules caractéristiques hydrostatiques, qui sont normalement assez bien maîtrisées par l'architecte naval :
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Pour connaître le rendement d’une voile dans un vent bien établi, on dispose des courbes polaires de la voile.
Pour obtenir la composante propulsive Rp, il est nécessaire de reporter sur le diagramme la route surface de l’engin à voile par rapport au vent apparent.
Les conditions expérimentales de mesure expliquent que chaque polaire correspond :
- à une vitesse du vent apparent bien défini et régulier,
- à une forme de voile figée.
De telles courbes établies dans des conditions scientifiques aident à comprendre mais ne sont pas directement exploitables quantitativement sur un engin à voile soumis à des oscillations, un vent irrégulier, des projections d’eau importantes sur les superstructures. En effet :
Les composantes lues sur une polaire, correspondent à un régime permanent ; elles exigent que pendant plusieurs secondes rien ne change. Pour pouvoir choisir les meilleurs choix aérodynamiques, il faudrait déterminer ces polaires pour toutes les conditions rencontrées ce qui est en pratique totalement impossible.
Cependant, on peut tout de même tiré des enseignements de leur forme générale.
c) Ecoulements le long de la voile |
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L’écoulement de l’air engendre des forces sur les solides déformables ou non. Il est donc important de bien analyser ce qui se passe le long de la voile pour pouvoir comprendre l’origine des forces propulsives et résistantes du voilier. Pour étudier ces écoulements on modélise la voile comme un profil d’aile portante car on ne peut parler d’aérodynamique navale sans évoquer la notion d’aile portante.
C’est selon ce principe que fonctionne les voiles d’un bateau mais aussi le gouvernail ou la quille...
De nombreux profils types existent en aéronautique, par exemple ceux du catalogue NACA (National Advisory Committee for Aeronautics - US), symétriques ou non, dont les dimensions et caractéristiques sont bien connues.
L’incidence correspondante varie en fonction du profil, de 15 à 20° en moyenne... Cependant ce phénomène dépend aussi de la vitesse de l’écoulement (ex : un avion qui manque de vitesse n’est plus porté par ses ailes et décroche, c’est aussi ce qui limite l’angle d’action du safran).
En conclusion, une bonne connaissance de l’écoulement autour de la voile est indispensable à la compréhension des réglages et des manoeuvres appliqués à la voilure.
Beaucoup de bateaux ont un plan de voilure composé de plusieurs éléments. On ne peut alors pas régler une voile sans tenir compte des autres. Par souci de simplification, nous allons raisonner sur le cas simple d'un foc et d'une grand'voile.
Le foc, en raison du couloir entre celui-ci et la grand'voile, souffle l'écoulement sur l'extrados de la grand'voile. Dans ces conditions, il recule le point de décollement éventuel, ou retarde son apparition, permettant ainsi d'admettre des angles d'incidence plus élevés : c'est l'aspect positif de la présence d'un foc.
L'inconvénient est que l'écoulement de l'air est perturbé par sa présence. Notamment, les filets fluides sont déviés, et ainsi, la composante propulsive de la grand'voile est moins orientée.
La présence de la grand'voile derrière le foc améliore l'écoulement sur l'extrados du foc par aspiration des particules fluides, et ainsi retarde l'apparition d'un décollement éventuel, ou diminue son effet en reculant le point de décollement : C'est l'avantage de la présence de la grand'voile derrière le foc.
Pour les bateaux classiques, pour lesquels la division du plan de voilure répond à un objectif de manoeuvrabilité, deux grandes options peuvent être dégagées :
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